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Familles japonaises, ou la normalité de l’absence

J’écris ce petit billet pour vous faire part d’une constatation qui m’a sauté au visage hier : si la famille japonaise « normale » est constituée d’un père, d’une mère et des enfants (oui les familles recomposées ne semblent pas encore faire partie de la « norme » par ici), il « parait » tout aussi normal que le-dit père ne soit que rarement présent …

Il me semble que j’avais déjà partagé sur Facebook et Twitter un article de l’excellent blog de Christelle qui abordait le sujet des relations homme-femme au japon et sur le rôle de chacun dans la cellule familiale. J’avais déjà eu l’occasion de constater certains de ces comportements, mais ce week-end, j’ai assisté à une scène qui m’a un peu perturbé.

J’avais décidé d’aller déjeuner dans fast-food japonais (MosBuger pour les curieux) et d’y rester un petit moment pour travailler mon japonais et faire une longue série d’exercices/devoirs. Je suis donc arrivé parmi les premiers dans le restaurant et j’ai pris mon temps pour manger et travailler en même temps (au passage, j’étais pas le seul à être venu travailler comme ça …). Etant resté plus long temps que la moyenne, j’ai pu voir défilé un certain nombre de « profils clientèle », et c’est là que je me suis progressivement rendu compte de ce qui était en train de se passer devant moi : nous étions Samedi midi, un moment que j’imagine normalement réservé au repas et sorties en famille, et environ 70% de la clientèle était constituée mères de famille plutôt jeune (la trentaine) accompagnant leur enfant (en moyenne entre 5 et 10 ans) pour manger ensemble. J’entends par là la mère et l’enfant seuls. Je me suis rapidement retrouvé entouré de duos mère-enfant venu faire une sortie en famille, sans le père qui avait visiblement d’autres obligations, le tout semblant parfaitement normal. J’ai bien vu une famille arriver au complet (le père, la mère, et les deux enfants), mais le père est reparti seul, rapidement après avoir mangé, en disant qu’il ne rentrerait probablement pas avant 23H30 …

Oui, je suis bien au Japon, le pays où les heures supplémentaires sont la norme, et où le rôle de la femme reste principalement celui de mère. Pourtant, je n’arrive toujours pas à comprendre comment on peut vivre heureux ici. Peut-être que je comprendrais mieux le jour où j’aurais des enfants, mais en attendant, ça reste quand même un des aspect du Japon qui continue à me déranger …

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  1. Honu
    6 février 2011 à 10:46

    Oui, je suis de ton avis tout ceci est déroutant, mais il y a une chose qui ne changeras jamais, en tant qu’observateur tu verras toujours les choses avec un regard occidental. Pour accepter et comprendre ce genre d’aspect de la culture je pense qu’il faut être né et avoir vécu avec!

    • 7 février 2011 à 08:11

      Ca va sans dire. Je ne suis qu’un visiteur dans un pays à la culture millénaire, et qui a réussi à se hisser durablement à la seconde place en terme de puissance économique mondial (bien que la Chine soit maintenant devant). Je ne compte pas faire de critiques sur un système qui fonctionne et dont je suis loin de comprendre tout les rouages, justement par ce que je ne le fréquente pas depuis assez longtemps (ceci dit un regard occidental ouvert peut parfois mettre le doigt sur quelque chose que les japonais n’auraient pas vu eux-même).
      En même temps, malgré la « normalisation » de ce phénomène, je ne suis pas sûr qu’il soit vraiment bien vécu non plus par les japonais (cf l’article de Christelle, qui mentionne une étude où la majorité des femmes japonaises aimerais voir leur relations de couples changer …).
      Il faut de tout pour faire un monde, et la société parfaite n’existe pas. Il faut juste choisir celle qui correspond le mieux à nos aspirations …

  2. Tam
    8 février 2011 à 10:36

    Bonjour (mon premier commentaire, soyons polie :p)
    Il me semblait que beaucoup de Japonais travaillaient le samedi, non ?
    Cela dit, la condition de la femme (même si elle tend à changer avec les nouvelles générations) est la principale raison qui fait que je ne passerai pas ma vie au Japon…

    Peut-être d’autres raisons me conforteront/me feront changer d’avis une fois que j’y serai !
    Et merci pour ton (je peux te tutoyer ?) gentil commentaire sur mon blog !

  3. cheppa
    19 février 2011 à 13:03

    « Il faut de tout pour faire un monde, et la société parfaite n’existe pas. Il faut juste choisir celle qui correspond le mieux à nos aspirations … »
    Tout à fait d’accord avec toi!
    Le blog de Christelle est intéressant à plus d’un titre, merci de l’avoir porté à ma connaissance.

  4. 4 mars 2011 à 18:00

    Bonjour,

    J’ai lu attentivement ton article.
    Et effectivement, tu ne sembles pas bien comprendre la mentalité japonaise sur la famille.

    Il est rare qu’au Japon les familles sortent ensemble.
    La famille aujourd’hui au Japon c’est un peu le modèle familiale des années 40 en France.
    Il n’y a pas eu les mêmes émancipations sociales et familiales qu’en Europe.
    Tout est resté donc assez traditionaliste.
    Ce sont dans les régions du Kansai que le traditionalisme est fort.

    Il y a des choses bien plus choquantes :
    – Les couples font souvent lits séparés, lorsque le mari sort il paraît que la femme est heureuse (sentiment de liberté)
    – L’enfant dans la famille est la priorité des priorités (comme le bébé qui dort avec sa mère au « profit » du mari)
    – La belle famille (surtout la belle famille du mari) est considéré comme envahissant et cela peut être un motif de divorce (je vous assure).
    – En parlant de divorce, la garde alternée. ça n’existe pas. C’est 100% pour l’un des 2 parents (on signe un papier mère ou père et c’est fini (vraiment consternant). Et c’est souvent pour la mère.

    Ce sont des situations qui existent je ne sais pas si elles sont très fréquentes.
    Mais je pense qu’il faut essayer de comprendre ces mentalités lorsque l’on vit dans le pays.

    • 7 mars 2011 à 06:07

      Il est possible que tu ais mal saisi le sens de mon article : je n’ai jamais eu prétention à « comprendre » la mentalité japonaise, et encore moins à « l’expliquer » (je ne suis ni sociologue, ni psychologue). J’ai juste cherché à partager un ressenti, faire part d’un instantané de la vie quotidienne.

      Ceci dit, pourquoi ne pas parler un peu de la mentalité de la famille japonaise de manière plus général …
      La famille aujourd’hui au Japon c’est un peu le modèle familiale des années 40 en France.
      Il n’y a pas eu les mêmes émancipations sociales et familiales qu’en Europe.
      Tout est resté donc assez traditionaliste.

      En te lisant, j’ai l’impression que la société japonaise à presque 70 ans de retard sur la société française (voire européenne). Mais je pense que les changements de mentalités qui ont lieux dans une société ont pour seul but de permettre aux membres de cette société de s’adapter aux évolutions sociales internes. Dit plus simplement : s’il n’y a pas de changement, c’est que la société n’en a pas besoin ; et ce schéma familiale semble bien adapté à la culture japonaise. De plus, si l’on aborde le coté « morale », je ne suis pas spur de savoir ce qui est le mieux : la famille japonaise « traditionaliste », avec la priorité donnée à l’enfant (potentiellement au détriment des parents ; or un enfant qui sent que ces parents ne sont pas heureux, ne sera pas heureux lui-même … et devra se constitué un « masque social », comme ses parents, et ainsi perpétuer le modèle) ; ou la famille française « émancipée », de plus en plus souvent recomposée (chose qui peut être plus ou moins bien vécu par l’ensemble de la famille, et peut donner lieux aussi bien à des drames, qu’à des expériences de vie en commun des plus enrichissantes). Tout n’est toujours qu’une question de point de vue.
      La majorité du reste viens du fait que la philosophie de « sacrifice pour le bien commun » est prépondérante au Japon et implique que :

      • Les femmes consacrent leur vie à leur progéniture
      • Les hommes se « tuent à la tache » pour le succès de leur compagnie, compagnie qui en retour prendra soin de leur famille (salaire, logement, …)
      • Et finalement que le père soit souvent absent de la maison

      En revanche, pour ce qui est des « anecdote généralisées », quelques petites remarques:

      • Une femme heureuse quand son mari « n’est pas là »/ »rentre tard ce soir »/…, malheureusement ça arrive dans toutes les sociétés : c’est le signe que le couple ne s’aiment plus vraiment avec passion, voire reste ensemble simplement pour ne pas être seuls (pour soi-même, ou aux yeux de la société)
      • Le bébé qui dort avec sa mère « au détriment » du mari, ça j’avoue que c’est typiquement japonais, mais en même temps j’avais entendu parlé d’un sondage où les femmes regrettaient cette situation, ne la suivait que par la force de l’habitude, et souhaitaient que les choses changent
      • La belle famille considérée comme envahissante : parce qu’en France, il n’y a jamais eu aucun couple qui se soient séparé, voire ait divorcé, pour les même motifs ?
      • En ce qui concerne la garde alternée, un projet de loi est en cours pour changer ça, et notamment se conformer aux accords internationaux déjà en place, pour le cas où l’un des parents est étranger.

      Pour finir, il est bien évident qu’il faut essayer de comprendre et de s’adapter aux particularités sociales d’un pays lorsqu’on y vit (« A Rome, fait comme les romains »), mais ça, si tu avais pris la peine de lire les commentaires de l’article, tu aurais compris que je tenais déjà ce discours …

  5. Tam
    14 mars 2011 à 11:05

    Des nouvelles ? Tout va bien pour toi ? Tu restes à Tokyo ?

    • 14 mars 2011 à 11:42

      Merci de t’en inquiéter …
      Je viens d’écrire un nouveau billet pour résumer ma situation …

  6. titus
    24 août 2011 à 05:19

    salut tous le monde ; je suis aussi intéressée par un sujet dans la famille japonaise mas c »est pas le même sujet je voulais savoir votre avis. voila : est ce que vous remarquez qu’il n’y a pas du respect entre le fils et ses parents? surtout pour le 1 ère fils?

  7. 25 avril 2012 à 10:26

    Quelle que soit la culture, je trouve qu’on y perd quelque chose à ne pas voir son enfant grandir et à ne pas tisser de lien privilégié avec. Mais bon, là, c’est certainement le père qui parle… 😉

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